Dans un contexte économique difficile, la SAFER PACA a souhaité contribuer à l’effort de solidarité vis-à-vis de la profession agricole, tout en restant fidèle à son cœur de métier, à savoir la préservation du foncier agricole par son exploitation. Elle a mis en place un dispositif permettant d’apporter une bouffée d’oxygène aux exploitants qui rencontrent des difficultés de trésorerie en se portant acquéreur provisoirement du foncier de l’exploitation et en permettant au propriétaire de le racheter aux mêmes conditions pendant 5 ans grâce à une clause dite « de réméré ».

Illustration de ce dispositif avec Bernard Duseigneur. Vigneron en Châteauneuf-du-Pape, il est l’un des premiers bénéficiaires de ce dispositif particulièrement adapté à la conjoncture.

« Nous sommes dépositaire d’un terroir très ancien, notre mission est d’en prendre soin et de le transmettre. » Bernard Duseigneur est vigneron depuis bientôt vingt ans. Il a repris le domaine familial qui s’étend sur une trentaine d’hectares à Saint-Laurent-des-Arbres dans le Gard auxquels s’ajoutent 10 ha sur Châteauneuf-du-Pape, le tout en biodynamie. « Si je veux constituer un modèle que mes enfants pourront reprendre face à des défis climatiques et environnementaux inédits, il faut préserver le vivant et faire en sorte que la biodiversité s’installe et se développe. » Avec son épouse, ils ont trois enfants dont un œuvre déjà sur l’exploitation. Leur souhait : offrir aux générations futures un patrimoine qui leur donnera la possibilité d’exercer leurs métiers respectifs. « Diriger un domaine viticole aujourd’hui nécessite de multiples compétences. Il ne suffit plus de conduire ses vignes et de faire son vin, il faut également savoir le vendre, à l’export notamment et savoir communiquer aussi. » Du travail, il y en aura donc pour trois sur l’exploitation mais à condition de transmettre un outil pérenne et structuré. « Il faut savoir maintenir l’intégrité d’un domaine, atteindre une taille critique pour que les enfants puissent continuer à valoriser l’expression des terroirs tout en s’adaptant à l’évolution des marchés. »

Structurer son parcellaire et le financer en pleine crise

Aussi, lorsque l’opportunité d’acquérir des parcelles en Châteauneuf-du-Pape se présente, Bernard Duseigneur n’hésite pas une seconde. Il se porte candidat auprès de la SAFER PACA dont le Comité Technique arbitre : « suite à la perte d’un fermage entraînant la réduction importante de ses surfaces en Châteauneuf-du-Pape, Bernard Duseigneur est retenu attributaire de plusieurs parcelles de vigne sur cette même appellation. »  Pour financer cette acquisition (200 000 € pour un peu plus de 63 ares), il décide de constituer un Groupement Foncier Agricole avec son épouse pour unique associée. Sa banque lui accorde un prêt à court terme qui vient à échéance cette année. Celui-ci devait être suivi d’un second prêt à moyen terme sur 15 ans mais l’année 2020 en a décidé autrement. « Entre la COVID et la crise avec les états unis, notre chiffre d’affaires a baissé de près de 40% », confie Bernard Duseigneur. Il contracte alors un Prêt Garanti par l’Etat destiné à soulager sa trésorerie. Mais ce PGE, devant être remboursé sur 5 ans, modifie de fait les capacités d’emprunt de l’exploitation. Le prêt à moyen terme envisagé pour l’acquisition des parcelles ne peut donc plus lui être accordé.

Un dispositif d’aide à la trésorerie pour les agriculteurs propriétaires exploitants

Il se tourne alors vers la SAFER PACA. « Bernard Duseigneur n’était plus en capacité d’aller chercher des financements. Tous les recours bancaires étaient bloqués, nous devions trouver une solution pour lui éviter de perdre une partie de son exploitation », explique Jean-Louis Canto, Président du Comité Technique du Vaucluse de la SAFER PACA.  « Lorsqu’à la crise sanitaire s’est ajoutée celle des taxes aux Etats-Unis, la pression est fortement montée notamment sur le monde viticole, je me suis dit qu’il fallait que nous trouvions des moyens d’agir. »

La Direction Générale de la SAFER PACA lui a alors proposé la clause de réméré qui avait été utilisée en 2017 suite au gel qui avait dévasté la filière arboricole alpine.

La clause dite « de réméré »

La clause dite « de réméré » permet à l’agriculteur de bénéficier d’une aide immédiate à la trésorerie sans perdre définitivement ni la propriété du bien vendu, puisque le vendeur dispose pendant 5 ans de la faculté de rachat, ni son exploitation puisqu’une convention d’occupation provisoire et précaire lui est accordée pendant toute la durée de la validité de la clause de réméré.

« Le réméré me permet aujourd’hui de compléter mon parcellaire sans qu’il y ait de risque de perte ou de plus-value potentielle », se satisfait Bernard Duseigneur. « C’est une idée très pragmatique et opportune qui montre à quel point la SAFER PACA est présente auprès des agriculteurs et proche de nos réalités. »

Pour Jean-Louis Canto, « le dispositif « de réméré » fait partie de la boîte à outils mise en place par la SAFER PACA, au même titre que la SCIC Terre Adonis qui, en fédérant un ensemble de partenaires publics et privés, a vocation à soutenir des projets d’installation et de consolidation qui répondent aux besoins des territoires. »

« Les dossiers de réméré nécessitent beaucoup de travail, ce sont des dossiers longs à monter. Il faut une volonté politique forte et une capacité à trouver des financements. Nous avons sollicité le Crédit Agricole pour constituer une enveloppe de 5 millions d’euros permettant un plafond d’aide par exploitation de 200 000€. » Un dispositif qui doit permettre à l’exploitant d’attendre que l’orage passe et de pouvoir se retourner.

Dans le détail, le dispositif est le suivant :

  • Rachat par la SAFER d’un foncier, propriété d’un exploitant ou d’une société dans laquelle l’exploitant est majoritaire, à moins 20% du prix de référence,
  • La SAFER consentira à l’exploitant une convention d’occupation précaire au montant de l’arrêté des fermages,
  • L’exploitant bénéficie d’une clause de rachat automatique pendant 5 ans aux mêmes conditions financières au travers d’une clause de réméré,
  • Ce dispositif sera ouvert aux exploitations disposant d’au plus 1,5 Seuil de Référence,
  • Le montant plafond d’intervention est de 200 K€ par exploitation,
  • En cas d’impossibilité de rachat par l’agriculteur au terme des 5 ans, la SAFER s’engage à lui verser le solde entre le prix initial acheté et le prix auquel elle rétrocèdera le bien à un tiers.